Alsace : Il y a 30 ans survenait le drame du crash du mont Sainte-Odile

Nous sommes en Alsace le 20 janvier 1992, il est à peu près 19 h 30 lorsqu’un doute commence à gagner la tour de contrôle de l’aéroport d’Entzheim situé tout proche de Strasbourg. L’Air Bus A 320 de la compagnie Air Inter ne répond plus depuis quelques minutes, c’est silence radio. L’avion, qui arrivait en provenance de Lyon, et qui devait atterrir à Strasbourg, a disparu des radars. Plus tard, on apprend que le pire scénario s’est produit, l’avion s’est écrasé dans les bois, tout proche de la commune de Barr et du Mont Sainte-Odile. Le bilan est catastrophique. En France, et plus particulièrement Alsace, le souvenir de cet accident hors du commun, l’un des plus importants drames aériens de notre histoire, est encore très vif. Nous allons simplement raconter les faits tels qui se sont produits ce jour-là, en nous appuyant sur des articles de presse locale et nationale. 

Nous sommes au mois de janvier, la nuit est déjà tombée, l’atmosphère est glaciale et le mercure est au plus bas en ce début de période hivernale. Comme tous les avions à l’approche de leur destination, le vol 5148 Air Inter tente une manœuvre d’atterrissage, alors qu’il se trouve à quelques kilomètres de l’aéroport de Strasbourg-Entzheim. Mais vous l’avez compris, rien ne se passera comme prévu.

Une approche inhabituelle en raison d’une visibilité nulle, ainsi une défaillance du système d’alerte de proximité du sol, une confusion entre les pilotes et l’appareil, une défaillance du cockpit, de nombreuses hypothèses sont avancées au fil des années qui suivra le drame de l’Airbus A320 qui fera 87 morts. Plus tard, l’enquête statuera sur des mises en examen de plusieurs parties prenantes au drame de ce soir-là. Le crash ayant été, d’après les éléments de l’enquête, dû à une multitude d’erreurs. Petit retour sur les faits, sur la conclusion de l’enquête, et sur la confusion qui continue de régner 30 ans après le drame. 

Crash du Mont Sainte-Odile
©SEBASTIEN BOZON


Un vol de routine pour un atterrissage peu courant 

Ce soir du 20 janvier, même si la pénombre détériore fortement la visibilité, c’est un vol de routine pour nos deux pilotes expérimentés. Mais à l’approche de l’aéroport de Strasbourg, le temps change brusquement et la visibilité devient totalement nulle, alors même que l’avion a déjà entamé sa descente. L’approche directe habituelle est donc impossible. Le pilote et le copilote signalent alors au centre de contrôle leur intention d’effectuer une autre procédure, dite ILS (approche aux instruments). Le contrôleur aérien l’avertit toutefois que ce choix forcera l’appareil à patienter, puisque trois autres avions sont en instance de décollage de la piste 05. Mais pour les pilotes expérimentes, pas question de prendre du retard et de recommencer à manœuvrer. 

Face à cette situation, le contrôleur aérien indique à l’Air Bus par radio que l’avion devra atterrir selon une approche VOR-DME, une procédure spécifique qui permet un guidage automatique de l’avion grâce à des balises radio. En clair, l’avion suivra un chemin préétabli et automatisé. Les pilotes hésitent, car c’est une procédure peu courante, mais acceptent finalement les ordres de la tour de contrôle. À 18 h 19, le contrôleur autorise l’équipage à l’approche finale.

Crash du Mont Sainte-Odile
©Kenan AUGEARD

 

Ils remettent leurs paramètres de vol à jour, sortent leur train d’atterrissage et se mettent à descendre, l’arrivée est imminente. Trente secondes plus tard, le contrôleur demande à l’équipage de revenir à la verticale. Celui-ci accuse réception : c’est le dernier contact avec l’avion. Quelques instants plus tôt, il semblerait que les pilotes aient donné le sentiment de peiner à se placer dans l’axe de l’aéroport et à trouver la bonne trajectoire. Contraints de gérer l’appareil à la fois horizontalement et verticalement, ils auraient délaissé les mesures de contrôle latéral et la gestion de la descente. À 18 h 20, l’appareil se crash à près de 350 km/h. 

Crash du Mont Sainte-Odile ©AFP association France Presse
©AFP association France Presse


Quelques longues minutes plus tard, à 19 h 32, l’alerte est donnée par le centre de contrôle de Strasbourg. Plus tard, le président d’Air Inter donne une conférence de presse et partage les premiers éléments dont il dispose. On imagine d’ores et déjà que l’appareil s’est probablement écrasé, mais pour que les secours interviennent, il faut trouver l’épave. En tout, plus de 200 policiers, gendarmes et pompier quadrillent un site de 20 km2. L’épave n’est retrouvée qu’à 22 h 30. 

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La faute à qui ? 

En 2005, treize ans après le crash, sept personnes sont mises en examen : un contrôleur aérien présent ce soir-là, trois anciens dirigeants d’Air Inter, deux cadres de la direction générale de l’aviation civile et un directeur technique d’Air Bus. La cause ? Le système DME, qui mesure la distance entre l'appareil et le sol, n'aurait pas fonctionné correctement selon les premières hypothèses. Mais mise en examen ne veut pas dire condamnation. En 2006, après deux mois d’audiences et plus de quatre mois de délibéré, le tribunal correctionnel de Colmar rend son jugement. Il relaxe les accusés. En septembre 2009, la Cour de cassation clôt définitivement la procédure pénale. Au final, une multitude de fautes et de facteurs techniques sont à l'origine de cette catastrophe, mais l'impossibilité de condamner pénalement les auteurs de ces fautes a fini par classer définitivement l'affaire. 

Crash du Mont Sainte-Odile ©AFP association France Presse
©AFP association France Presse

 

Auteur : Bastien Pietronave