Quand l’Alsace s’engage pour l’Arménie 

Implantée à Strasbourg, la jeune association Cœur d’Arménie organise une série de concerts en cette fin juin afin de soutenir l’orphelinat Notre-Dame d’Arménie implanté à Gyumri. Trente jeunes choristes vont venir chanter à Saint-Jean-Saverne, au Mont Sainte-Odile et à Strasbourg, tout en découvrant le patrimoine local, notamment à travers une sortie à bord d’un bateau-promenade de Batorama. Entretien avec Micheline Debus, la présidente de l’association. 

Le Chœur Notre-Dame d'Arménie sous la direction du Maestro Robert Milkeyan © DR
Le Chœur Notre-Dame d'Arménie sous la direction du Maestro Robert Milkeyan © DR

Comment est né votre engagement pour l’orphelinat Notre-Dame d’Arménie à Gyumri ?  

Cela remonte à fin 2010 au moment de mon départ à la retraite après ma carrière d’enseignante. J’avais envie de m’engager dans une mission humanitaire pour rendre aux autres ce que j’ai reçu. Je me suis alors inscrite au sein du Groupement des Educateurs Sans Frontières (GREF). Après avoir assisté à diverses réunions, j’ai décidé de me porter volontaire pour l’Arménie. Je suis d’abord partie effectuer une mission de deux mois dans le cadre du soutien à la francophonie à Gyumri. Je collaborais avec des écoles sur place qui donnent des cours de français. Très vite, j’ai rencontré des gens accueillants, chaleureux et charmants. Quand je leur ai dit au revoir, j’étais très émue. Juste avant de partir, ils m’ont dit de revenir l’année suivante. Je ne pouvais pas dire non. Et c’est de cette façon que j’y suis retourné chaque année pendant cinq ans, toujours dans le cadre du GREF. J’ai appris à connaître la culture locale. J’ai fait plusieurs fois le tour du pays. Puis, en 2015, le GREF a arrêté de s’y rendre car les municipalités partenaires n’avaient plus d’argent pour financer des coopérations internationales. Etant donné les besoins sur place, j’ai décidé de poursuivre mon engagement en tant que bénévole pour l’orphelinat Notre-Dame d’Arménie à Gyumri.

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Pourquoi cet orphelinat en particulier ? 

Car je l’avais découvert à travers les cours de français en lien avec un lycée professionnel et une maison de retraite de jour. Je savais qu’ils avaient besoin de bénévoles et leurs actions m’ont touchées. J’ai d’abord commencé par participer à la vie quotidienne, en emmenant les enfants à l’école par exemple. Cet orphelinat, fondé par sœur Aroussiag suite au séisme de 1988, privilégie beaucoup la pratique culturelle, qui apporte du bonheur aux enfants dans un esprit de partage. On y danse, on y chante, on y suit des cours de piano et de violon. On me parlait beaucoup de la chorale de jeunes filles, dirigée par le maestro Robert Mlkeyan de l’orchestre national de Erevan. J’allais chaque dimanche matin à leur répétition. Il s’agit quand même d’une chorale qui a donné de nombreux concerts, au national et à l'international, en réponse aux invitations des bienfaiteurs. Puis j’ai bêtement demandé s’ils comptaient venir un jour à Strasbourg. Ils m’ont répondu dès que nous les inviterons. Je suis alors rentré en contact avec l’association Amitiés Alsace Arménie mais le président, pour des raisons personnelles de santé, ne pouvait pas répondre à notre sollicitation. Il nous a conseillés de fonder notre propre association. C’est comme ça que nous avons décidé, avec un groupe d’amis, de créer fin 2019 l’association Cœur d'Arménie, afin d'apporter une aide plus importante et plus structurée aux enfants de cet orphelinat, en soutenant leurs projets éducatifs et culturels. Il faut savoir que l'année 2020 y a été particulièrement difficile, car non seulement les enfants portent les stigmates de leur histoire familiale, mais à cela se sont ajouté les risques sanitaires du covid, les nouvelles difficultés économiques et politiques et la perturbation des scolarités. Sans oublier le tragique épisode de la guerre au Karabach qui a été très meurtrière. 

« Je remercie tous nos bénévoles » 

Votre projet de les faire venir chanter en Alsace en 2021 a été reportée à cause de la crise sanitaire. Où en est-il ?  

Il va bien pouvoir avoir lieu. Il nécessite une solide organisation et un budget important pour notre petite association d'une cinquantaine de membres. Cela comprend l’aller-retour en avion, les hébergements, la restauration, la logistique des concerts. Le report du projet nous a finalement permis de trouver la plus grande partie des ressources financières indispensables à une telle invitation. Il s’agit d’un budget total de 28 000 euros, réunis grâce à des donateurs privés et institutionnels, aux mécénats d’entreprises locales, aux dons de particuliers, mais aussi via deux campagnes de crowdfunding, la vente de bérets du Caucase procurés par l’association Amitiés Alsace-Arménie, les brocantes ou encore les vides-dressings. J’en profite pour remercier tous nos bénévoles, en particulier notre dizaine de membres actifs sur Strasbourg.

Micheline Debus au côté des jeunes filles de l’orphelinat à Gyumri © DR
Micheline Debus au côté des jeunes filles de l’orphelinat à Gyumri © DR

Pouvez-vous nous présenter le programme des concerts ? 

Le projet concerne 30 choristes et 7 accompagnateurs adultes. Ils vont venir chanter sur trois concerts dans des lieux mythiques : le 24 juin à l’Abbatiale de Saint-Jean-Saverne, le 25 juin au Mont Sainte-Odile et le 26 juin à la messe de 11h à la Cathédrale de Strasbourg puis le soir même à l’Église Saint-Pierre-le-Jeune de Strasbourg. Les concerts et la reconnaissance qu'ils procurent sont très importants dans le parcours de ces orphelines. Comme dit le Maestro : « la fréquentation d'un art rend les enfants bien-pensants quant au futur de leur pays. Ces enfants ont besoin de gens bienveillants et généreux. La vie les a déjà privés de beaucoup. »

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Il s’agit-là d’une belle parenthèse alsacienne. Qu’avez-prévu entre les différents concerts ?

Ils seront là du 22 au 27 juin. Nous avons donc le temps de leur faire découvrir Strasbourg à travers différentes visites, et des activités éducatives et culturelles. Mercredi 22, nous ferons le tour de la ville en petit train avant de visiter la cathédrale puis de partager un dîner au Foyer de l'étudiant catholique. Le lendemain matin, nous visiterons le Conseil de l’Europe. Nous serons accueillis par l’ambassadeur d’Arménie, puis nous déjeunerons au Roi et son Fou. L’après-midi aura lieu notre promenade à bord d’un bateau Batorama que nous remercions pour les places offertes. Le soir aura lieu la répétition. Le vendredi matin, nous nous rendrons sur la plateforme extraordinaire de la cathédrale. Puis on enchaînera par une visite guidée du Musée Alsacien, avant de prendre la direction de Saint-Jean-Saverne pour le premier concert. On conclura cette journée par une soirée tarte flambée offerte par la municipalité. Le samedi, après un brunch à l’hôtel, nous monterons au Mont Saint-Odile pour un concert sur le parvis du couvent. Le soir, nous partagerons crêpes et galettes chez Crep’Mili. Dimanche 26, elles chanteront à la messe de 11h de la cathédrale, avant un déjeuner à La Chaîne d’Or. Puis aura lieu le grand concert du soir à l’Eglise Saint-Pierre-le-Jeune, avec un piano à queue prêté par la Maison Ades Prestel. Toutes et tous ponctueront leur séjour par une soirée choucroute offerte par le restaurant Le Gruber à Strasbourg.

Le Chœur Notre Dame d'Arménie (chorale de l'orphelinat de Gyumri) sous la direction du Maestro Robert Milkeyan, avec au piano Lilia Manoukyan. Concerts gratuits. 

  • Abbatiale de Saint-Jean-Saverne le 24 juin à 20h 
  • Mont Sainte-Odile le 25 juin à 14h15 
  • Messe de 11h à la Cathédrale de Strasbourg le 26 juin 
  • Église Saint-Pierre-le-Jeune de Strasbourg le 26 juin à 17h

Recueilli par Florian Dacheux 

A propos de l'auteur

Trentenaire basé en banlieue parisienne, Florian navigue dans le monde des médias depuis 2005. Des bases du métier appris en presse quotidienne régionale à Avignon, il a connu une expérience de correspondant à Barcelone, le reportage en radio depuis Marseille, ou encore l’édition numérique dans diverses rédactions parisiennes. Freelance depuis 2015 en tant que reporter et rédacteur pour la presse magazine et digitale, il réalise différents types de sujets de société. Florian anime également des ateliers d’écriture et pratique la photographie.

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