A la rencontre de : Jérome Anna, directeur de l'hôtel Hannong

C’est un hôtel emblématique de la capitale alsacienne qui a vu passer quatre générations, c’est une maison à la décoration contemporaine avec un style années 30, un lieu de vie, une terrasse intimiste au cœur de Strasbourg et aussi un bar à vin. Vous l’aurez deviné, nous vous emmenons aujourd’hui à la rencontre de l’hôtel Hannong et de son gérant, Jérome Anna. Laissez-vous porter par son histoire, et celle de son hôtel.

Jérome, qui es-tu ?

Je suis quelqu’un qui aime la vie, les gens et les rencontres. Je suis spontané et enthousiaste. J’attache beaucoup d’importance aux rapports humains qui sont passionnants. J’ai beaucoup de bonheur à partager des moments avec ma famille et mes amis autour d’un bon repas ou d’une bonne bouteille de vin par exemple. 
Sur le plan professionnel, j’ai beaucoup de chance de faire ce métier d’hôtelier, qui me permet de m’épanouir pleinement. 

As-tu toujours souhaité reprendre les rênes de cet hôtel ? 

Ce n’est pas une chose à laquelle je me destinais à priori, bien que l’hôtel soit un hôtel familial. Je n’ai pas fait l’école hôtelière. Personne ne l’a faite dans ma famille d’ailleurs, ni mon arrière-grand-père qui était architecte, ni mon grand-père, ni mon père. En ce qui me concerne, j’ai fait des études très générales en sciences économiques, et c’est après ma maîtrise que mon père m’a proposé de le rejoindre. A l’époque il recherchait quelqu’un pour s’occuper de la commercialisation de l’hôtel Hannong. Ça tombait à point nommé puisque j’étais disponible à ce moment-là. Je me suis dit « Allons-y ! ». De fil en aiguille, petit à petit, j’ai découvert tous les métiers qui se cachent derrière ce métier passionnant qu’est celui d’hôtelier. J’ai évolué à mon rythme au sein de l’entreprise pour en prendre la direction, il y a maintenant 10 ans.

Le nom de ton hôtel a-t-il un lien avec les faïenciers de la famille Hannong ?

A la place de l’hôtel au 18ème siècle il y avait une fabrique de faïences qui appartenait à une famille hollandaise qui venait de Maastricht. L’hôtel a repris le nom de cette fabrique, tout comme la rue avec laquelle l’hôtel fait l’angle (NDLR : l’hôtel Hannong se trouve à l’angle de la rue du 22 novembre et de la rue Hannong à Strasbourg). On imagine que les hollandais, qui voyageaient beaucoup à l’époque, sont passés par l’Asie et ont récupéré ce nom là-bas, d’où cette consonnance asiatique. (NDLR : le père du fondateur de la faïencerie Hannong était un aventurier hollandais parti faire fortune au service la Compagnie des Indes Orientales. Le jeune Jacob van Outwater fut un des premiers explorateurs européens à sillonner la Chine pendant 15 ans. A son retour en Europe, il change son nom en Pieter-Hendrick Hannong, Hannong presque comme la ville de Hanzhong où il s’était établi longuement.)

La façade de l'hôtel Hannong de Strasbourg

Cet hôtel est dans ta famille depuis sa création, peux-tu nous raconter son histoire ? 

Les frères Horn (mon arrière-grand-père et son frère) se sont vu confier le projet de « La grande percée ». L’histoire se déroule aux environs de la première guerre mondiale. La ville a décidé de donner de l’ampleur au centre-ville, d’éclaircir un lacis de ruelles médiévales avec un habitat insalubre et de créer un vaste axe de communication entre la gare et la place Kléber. Paul et André Horn ont donc redessiné la rue du 22 novembre avec cette courbe tout à fait singulière. Ils ont construit plusieurs immeubles dans cette rue et ont notamment créé un hôtel qui a ouvert en 1920. L’hôtel Hannong est donc déjà centenaire et c’est toujours une entreprise familiale puisque je représente la 4ème génération. 

Quel est le lien de l’hôtel Hannong avec Strasbourg ?  

C’est un point essentiel ! L’hôtel Hannong a une identité forte de par son ancrage dans l’histoire artistique de la ville. Les frères Horn étaient tous les deux collectionneurs d’art moderne. Ils ont fait appel à une artiste suisse de renom, Sophie Taeuber, pour décorer ce qui s’appelait autrefois « le cabaret dancing » de l’hôtel Hannong. (C’est là où nous sommes en ce moment même). Aujourd’hui, on peut reconnaitre le volume qui est resté le même avec notamment cette belle hauteur sous plafond. (NDLR : Le décor de l’époque est représenté sur une grande fresque murale dans le salon Horn qui rend hommage à la famille et illustre cette relation étroite avec la ville.)

Le cabaret dancing de l'hôtel Hannong de l'époque
Le cabaret dancing de l’époque représenté sur la fresque de l’hôtel

Il faut savoir que les frères Horn ont beaucoup fait à Strasbourg dans les domaines de l’urbanisme et de l’art. Ils ont été les initiateurs du projet de l’Aubette, place Kléber, un projet complètement fou pour l’époque ! En complicité avec la ville de Strasbourg, ils ont décidé de créer un grand complexe de loisirs au cœur de la ville comme il n’y en avait pas d’autre en France. Et avec « complexe de loisirs » j’entends « offrir aux Strasbourgeois la possibilité d’avoir plusieurs activités en un même lieu en une soirée : aller boire un verre, dîner, voir un spectacle, regarder un film, aller danser... » 
Ce projet était totalement novateur sur ce plan-là mais aussi et surtout sur le plan de sa réalisation car il a été pensé comme une œuvre d’art totale !

Paul et André Horn ont confié la réalisation et la décoration de toutes les salles de l’Aubette à Sophie Taeuber et à son mari Jean Hans Arp. Le projet était tellement colossal que les deux artistes ont sollicité leur ami peintre et architecte hollandais Theo Van Doesburg pour les rejoindre dans l’aventure. Ils ont créé un décor complètement avant-gardiste à l’époque avec des lignes droites, des angles, des formes géométriques, des obliques et des couleurs primaires. (NDLR : on dirait une toile de Mondrian en 3 dimensions).
Ce décor, qui n’a malheureusement pas remporté l’adhésion des Strasbourgeois, a été transformé assez rapidement. Les artistes en ont été meurtris car c’était l’œuvre de leur vie. Il a fallu attendre des décennies pour que la ville de Strasbourg décide de restaurer les décors du premier étage de l’Aubette tels qu’ils avaient été imaginés par les artistes. 

Aujourd’hui, dans l’hôtel, nous cultivons ce lien artistique avec la ville à travers notre parti pris quant au décor qui reprend justement les codes des années 30 tout en étant contemporain. Il y a 20 ans, mon père a initié cette démarche en donnant un style « Années 30 » à notre salon Horn pour faire écho au Cabaret Dancing de Sophie Taeuber

Le salon Horn de l'hôtel Hannong de Strasbourg
Le salon Horn aujourd’hui avec sa fresque murale retraçant les travaux des frères Horn à Strasbourg


Aujourd’hui, à ma manière, je renforce encore cette identité puisque nous avons refait le hall d’entrée dans ce même esprit il y a 3 ans. On retrouve également ce fil conducteur « Années 30 » dans tous les embellissements récents de la maison que ce soit au niveau des chambres, des paliers ou des salons de réunion.
Je pense que cela a beaucoup d’importance, car des décors contemporains, on en voit partout. Le nôtre fait sens avec l’identité de notre hôtel et la relation étroite que nous cultivons avec l’histoire de la ville !

Il y a un grand nombre d’hôtels à Strasbourg, est-ce que tu penses que c’est ce lien fort avec Strasbourg, cette identité propre à ton hôtel qui le différencie des autres ?

Oui complètement ! L’hôtel Hannong se différencie à travers le parti pris et l’engagement très fort de décoration ! Mais il se différencie aussi (et c’est bien sûr lié) à travers l’âme qui existe dans notre maison. C’est ce que ressentent et apprécient nos clients quand ils séjournent chez nous. 

Et il y également nos lieux de vie qui nous permettent de nous différencier : 

  • Notre bar à vin Le Black&Wine que nous avons lancé il y a maintenant 7 ans. Ce bar, nous l’avons voulu dans un style de décor singulier avec une harmonie de noir et de bois naturel. Les bouteilles de vin sont joliment mises en scène. Nous proposons une belle sélection de vins au verre qui évolue régulièrement, de bons plats maison qui accompagnent les vins et une équipe de sommeliers passionnés pour mettre cela en musique. Nous avons voulu que ce soit une alternative à la restauration traditionnelle
  • Le salon baptisé Salon Horn en hommage au fondateur de l’hôtel
  • Le rooftop

Ces lieux de vie vivent autant avec les Strasbourgeois qu’avec les clients de l’hôtel. C’est un peu le trait d’union entre les locaux et les visiteurs de la ville.  

Tu disais au début de notre rencontre que tu aimais rencontrer de nouvelles personnes, c’est pour cela que tu as fait de cet hôtel un lieu de vie « complet », avec ce bar à vin notamment ? 

Ah mais oui, et cela permet également aux gens de se rencontrer ! Tu as raison de me poser cette question ! 
Je ne pourrais pas imaginer l’hôtel Hannong sans son bar à vin. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai tenu il y a quelques temps à changer le nom de l’hôtel. Avant c’était simplement « Hôtel Hannong », et maintenant c’est « Hannong Hôtel & Wine Bar ». C’est pour dire à quel point le bar à vin fait partie intégrante de l’identité du lieu ! Le bar à vin est un bon moyen de faire découvrir l’hôtel aux Strasbourgeois, et l’hôtel sert le bar car il lui apporte une clientèle complémentaire. 

Il y a aussi une partie événementielle à l’hôtel, car nous proposons des événements destinés aux Strasbourgeois pour créer de la vie, de l’expérience client et susciter des émotions. Nous organisons régulièrement des soirées dégustations commentées par notre équipe de sommeliers et des soirées rooftop avec DJ sur notre terrasse qui est un petit écrin de verdure au cœur de la ville. Nous avons aussi imaginé des parcours dans l’hôtel avec différentes saynètes dans les chambres. Je dis souvent qu’un hôtel c’est un grand théâtre ! Nous ne sommes limités que par notre propre imagination. Il y a tellement de choses à créer ! Comme je l’ai déjà dit, nous avons la chance d’avoir beaucoup d’espaces qui nous permettent de proposer des opérations originales, différenciantes, d’éveiller la curiosité de nos clients, de les surprendre et de les séduire !  Avec l’équipe, nous cassons les codes pour créer de l’émotion.

Une soirée organisée sur le rooftop de l'hôtel Hannong

 

Comment résumerais-tu l'hôtel Hannong & Wine bar en quelques mots ? 

Un style, une âme et de la vie, voici les 3 mots qui résument le mieux l'hôtel Hannong d'après Jérome, son directeur. Il nous en dit plus dans la vidéo ci-dessous :

 

Tu as des enfants, qui sont encore jeunes certes, mais vois-tu déjà une envie de leur part de reprendre l’hôtel ? 

Mon fils Oscar m’en parle déjà ! Enfin pour l’instant il me le dit comme ça mais il est encore trop jeune pour se projeter. 
Moi je trouverais cela merveilleux que l’un ou l’autre, ou les deux, veuillent prendre le relai, parce que c’est beau d’avoir une entreprise familiale qui est pérenne. Maintenant je pense qu’il ne faut surtout pas enfermer ses enfants dans une direction qui ne leur correspond pas. Je pense que les choses se feront naturellement ou ne se feront pas. Ce que je souhaite, c’est ouvrir au maximum leur esprit pour qu’ils puissent expérimenter différentes choses, choisir un métier en toute connaissance de cause, un métier dans lequel ils puissent s’épanouir. C’est ça la vérité, hôtel Hannong ou pas ! 


Comment as-tu vécu cette année si particulière avec la pandémie liée à la Covid 19 ? 

A titre personnel, je l’ai bien vécue, dans le sens où, malgré le contexte, ou pourrais-je même dire grâce à ce confinement, à ce ralentissement, et même grâce à la fermeture de mon hôtel, j’ai pu découvrir d’autres choses. Par exemple, je me suis mis à cuisiner, et à y prendre beaucoup de plaisir ! Jamais je n’aurais pu imaginer ça ! J’ai découvert ce plaisir particulier que de cuisiner pour les gens que j’aime. J’ai toujours aimé recevoir, mais recevoir quand on a cuisiné avec le cœur, c’est encore beaucoup plus intense car on donne un peu ou même parfois beaucoup de soi ! Ces moments de partage deviennent plus vrais, plus intenses ! 

Sur le plan professionnel, au niveau de l’hôtel Hannong, ça a été très douloureux, bien sûr ! Cet hôtel doit être en vie et vibrer avec les touristes dans les étages et avec les Strasbourgeois dans notre bar à vin ! Nous avons 72 chambres. Normalement nous connaissons un taux d’occupation annuel  moyen de plus de 85%. C’est un hôtel où il y a tout le temps de la vie !
Le fait de devoir fermer l’hôtel une première fois en mars 2020 et que cette fermeture dure plusieurs mois avant de rouvrir avec toute la joie et l’excitation que ça a entrainé, et puis à nouveau, le coup de massue avec le couvre-feu et le deuxième confinement, et donc une seconde fermeture, ça a été compliqué à vivre. Compliqué à vivre pour l’hôtelier que je suis, et bien sûr aussi pour mon équipe. Un hôtel est un lieu de vie, et pour que ça vive, il faut que se développe cette alchimie si spéciale entre des clients et une équipe. Car c’est ça aussi l’âme de la maison ! C’est l’équipe qui la fait vivre. 

 

Si vous aussi, vous avez envie de faire un break le temps d'un week-end, de vous évader à deux pas de chez vous, dans un hôtel agréable et convivial, n'hésitez pas à réserver votre séjour à l'hôtel Hannong


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